Léger comme une navette le désir

Pourquoi pleurer sur le crâne chauve de l’ennui
Odieux ou autrement
Esthétique
Raisonneur
Ennui à la française
Je sais fort bien coudre des faux cils à mes paupières
L’agate chasse la haine dans la pâleur d’un regard
Je sais pasticher l’ombre qui ferme les portes
Quand l’amour
Claque des lèvres debout dans le couloir
En relisant tes lettres je pense à nos promenades
Les promesses de l’été qui tardent place Dauphine
Bâillent sous cloche
Il est déjà cinq heures
Partis les cerfs-volants les sages pavés l’imprudence poussière
Brouillé le parterre quadrillé comme un mouchoir
Enlisé le regard lascif
La laine s’entasse sur la patère
La nuit gargouille inerte
Beau désordre sur ma table
Pourquoi pleurer au-dessus d’un baquet de sang
Pourquoi fourrager entre les cuisses du vieux
Venise
Je suis prête à vous couvrir
De ma langue trémière de mon doux bocage
Prête à ciseler mon pelage
Voler chez les boutiquières
Sauter le fossé sans jupons ni oeillères
Pour sombrer encore humide entre tes bras de pacotille
Pourquoi surnager se maquiller se divertir
Pourquoi répondre
Pourquoi fuir
Le souvenir de ton sommeil glacé
Me suit pas à pas
Quand pourrai-je te revoir
Sans verser des larmes sur moi
Notes:

Read the English-language translation, “Light as a Shuttle Desire” by Emilie Moorhouse.

This poem is part of “When Can I See You Again: The Poetry of Joyce Mansour,” translated by Emilie Moorhouse. You can read the rest of the portfolio in the June 2023 issue. The poems in the original French are copyright © 1953, 1955, 1958, 1959, 1960, 1965, 1967, 1976, 1982, 1985, 1986, 1991, 2014, 2023 by Cyrille Mansour for the Estate of Joyce Mansour.

Source: Poetry (June 2023)